L'expédition
Le Denali est une montagne exceptionnelle. Par tous ses aspects. Que ce soit par le froid intense qu’on y vie (-35 degrés et parfois même moins), par les vents violents (parfois plus de 100 km/h), par les falaises escarpées qu’on doit monter, par l’instabilité du climat qui change à une vitesse effarante ou par la difficulté d’une expédition de 3 semaines sans aucun porteur dans certaines des conditions les plus inhospitalières de la Terre, chaque grimpeur est poussé à sa limite. Et la vue récompense chacun de ces efforts.
Situation Géographique Altitude Prix Temps requis % de réussite
USA, Amérique du Nord 6,194 m. 4,500 @ 7,000 18 @ 21+ jours 50%
Le Denali est une montagne exceptionnelle. Par tous ses aspects. Que ce soit par le froid intense qu’on y vie (-35 degrés et parfois même moins), par les vents violents (parfois plus de 100 km/h), par les falaises escarpées qu’on doit monter, par l’instabilité du climat qui change à une vitesse effarante ou par la difficulté d’une expédition de 3 semaines sans aucun porteur dans certaines des conditions les plus inhospitalières de la Terre, chaque grimpeur est poussé à sa limite. Et la vue récompense chacun de ces efforts.
Situation Géographique Altitude Prix Temps requis % de réussite
USA, Amérique du Nord 6,194 m. 4,500 @ 7,000 18 @ 21+ jours 50%
J’arrivais d’une expédition au mont Aconcagua quelques mois auparavant et je n’ai pas lésiné sur l’entrainement entre les deux. Je vie certes au niveau de la mer et le plus grand dénivelé accessible près de ma maison est l’étage que je dois monter pour arriver à mon bureau de travail, mais il y a quand même plusieurs autres options disponibles avec de la motivation et de l’imagination. Triathlon, stairmaster, pliométrie, tennis… Des heures de plaisir ! Mais comme j’ai déjà lu sur le site d’un grimpeur : Toutes ces heures de dur entrainement ne deviennent qu’un heureux souvenir une fois sur la montagne !
Dès la journée 1 sur le Denali, on a notre premier test. Une fois toute la logistique effectuée, l’équipement validé (il est trop tard une fois sur la montagne), les permis obtenus et le vol sur le glacier (l’avion a des skis pour atterrir), on réalise que c’est pour vrai. Quand le petit Cesena décolle en nous laissant sur le glacier, c’est le combat psychologique qui commence. The game is on !
Dès la journée 1 sur le Denali, on a notre premier test. Une fois toute la logistique effectuée, l’équipement validé (il est trop tard une fois sur la montagne), les permis obtenus et le vol sur le glacier (l’avion a des skis pour atterrir), on réalise que c’est pour vrai. Quand le petit Cesena décolle en nous laissant sur le glacier, c’est le combat psychologique qui commence. The game is on !
On ne dormira qu’une nuit au camp de base. Dès le lendemain, c’est le temps de commencer la grimpe. On prend notre sac de 27kg (60lbs) et on attache notre luge de 25kg, puis on s’encorde, puis on quitte le camp.
Nous avons marché pendant toute la journée dans un décor féérique. Nous avons traversé le glacier au complet pour nous rendre au camp devant la ‘ski hill’. Une longue journée. Mais nous avons rapidement appris qu’au Denali, la journée n’est pas terminée quand on arrive au camp. Parce qu’on doit le construire. On doit tester le terrain pour les crevasses, on doit applanir la pente pour créer une plateforme pour les tentes, on doit creuser un abris cuisine et on doit creuser une toilette. Près de 2 heures de travail. Une chance que le paysage est magnifique. Devant nous, le Denali nous observe. Derrière, c’est Foraker. On se sent petit. Un autre avantage aussi : Comme on est presque sur le cercle arctique, il ne fait pas noir avant minuit !
Le lendemain matin, on a une surprise. Un des membres de l’équipe y a pensé et il a pris la décision de rentrer. C’est trop difficile pour lui.
Je suis désigné avec une coéquipière pour le raccompagner au camp de base. On devra faire tout le chemin de la veille. Aller-retour.
Les sacs étaient plus légers, mais le défi a été important. On a au moins réussi notre mission alors on pourrait poursuivre la progression.
Au Denali comme sur beaucoup de hautes montagnes, on doit établir des caches. On monte le plus haut possible, on creuse un trou de 6 pieds dans le sol et on y laisse tout ce qu’on aura pas besoin avant quelques jours. Puis on enterre le trou et on redescend plus bas pour dormir. Les charges sont un peu diminuées et on s’acclimate.
Je suis désigné avec une coéquipière pour le raccompagner au camp de base. On devra faire tout le chemin de la veille. Aller-retour.
Les sacs étaient plus légers, mais le défi a été important. On a au moins réussi notre mission alors on pourrait poursuivre la progression.
Au Denali comme sur beaucoup de hautes montagnes, on doit établir des caches. On monte le plus haut possible, on creuse un trou de 6 pieds dans le sol et on y laisse tout ce qu’on aura pas besoin avant quelques jours. Puis on enterre le trou et on redescend plus bas pour dormir. Les charges sont un peu diminuées et on s’acclimate.
On a ensuite passé le ski hill et on a atteint le camp 11'000. Un bel endroit avec des vues superbes sur les montagnes et sur le glacier nous entourant. On y construit un bon abris entouré de blocs de neige et de glace sciés pour se protéger du vent parfois violent. Le camp 11'000 sont les photos ci-dessus.
C’est ensuite le moment de passer à une autre étape. On laisse l’approche. On est vraiment rendu sur la montagne. Crampons, piolets. Et pentes abruptes ! Là, on s’amuse !
On laisse un autre cache passé Windy Corner (devinez pourquoi on appelle ce col comme ça) et on apprécie la vue.
C’est ensuite le moment de passer à une autre étape. On laisse l’approche. On est vraiment rendu sur la montagne. Crampons, piolets. Et pentes abruptes ! Là, on s’amuse !
On laisse un autre cache passé Windy Corner (devinez pourquoi on appelle ce col comme ça) et on apprécie la vue.
On atteint le camp 14'000 avec une bonne météo. La plupart du temps, on a vu de forts vents sur le sommet, mais c’était plutôt agréable pour nous. On espère que tout va être correct dans une semaine ou une semaine et demi quand on tentera le sommet.
On restera quelques jours au camp 14'000 pour s’acclimater et parce que la météo s’est rapidement dégradée. Dans une journée de repos, nous avons quand même atteint le ‘edge of the world’, un des meilleurs panorama de la montagne.
On restera quelques jours au camp 14'000 pour s’acclimater et parce que la météo s’est rapidement dégradée. Dans une journée de repos, nous avons quand même atteint le ‘edge of the world’, un des meilleurs panorama de la montagne.
Nous avons aussi construit un igloo au cas où la météo serait trop mauvaise pour utiliser la tente cuisine.
Puis, on passe sur le niveau 3. On attaque les cordes fixes. En fait, on monte une pente de plus en plus à pic (1'500 pieds), puis on s’attache pour une montée de 800’ incliné à parfois 45 degrés et rempli de glace noire. Tout un défi. Je n’aurai évidemment pas pris beaucoup de photos pendant la monté parce que j’étais occupé à grimper justement ! Oh, et nous avons toujours des sacs de 50 lbs.
Vers la fin des cordes fixes et lors du début de la traverse sur le sommet par contre, un membre de l’équipe était très fatigué. Trop fatigué. Il a été fort pendant tout le début de l’expé, mais là, le corps ne suit plus. Il est contraint de redescendre. Il ne pourra pas continuer avec nous parce qu’un grimpeur trop fatigué dans cette partie de la montagne devient un grimpeur dangereux. Notre assistant guide et lui nous quitte. Nous ne somme plus que 3 clients et le guide principal.
Vers la fin des cordes fixes et lors du début de la traverse sur le sommet par contre, un membre de l’équipe était très fatigué. Trop fatigué. Il a été fort pendant tout le début de l’expé, mais là, le corps ne suit plus. Il est contraint de redescendre. Il ne pourra pas continuer avec nous parce qu’un grimpeur trop fatigué dans cette partie de la montagne devient un grimpeur dangereux. Notre assistant guide et lui nous quitte. Nous ne somme plus que 3 clients et le guide principal.
Avec de bons vents, on se rendra au high camp. La traverse est clairement un haut fait de l’expédition. 500m d’un côté, 400m de l’autre. Il faut rester concentré. Encore une fois, les photos sont seulement dans les parties moins exposées ! C’est vraiment une aventure superbe.On arrive ensuite au camp 17'000. Le dernier camp avant le sommet. C’est là qu’on doit demander à la montagne d’être indulgente. L’endroit est froid, aride, hostile. Le vent est presque constant. Le douillet sleeping bag -40 degrés appelle souvent. Les visites nocturnes à la toilette sont à proscrire !
Après notre première nuit, on se réveille avec une bonne météo. Je suis surpris. Il faut que la météo tienne quelques jours encore par contre pour qu’on ait une chance.
On entend, puis on voit ensuite un hélicoptère. C’est tellement haut que l’hélico doit aller plus bas, doit être purgé de la majorité du carburant, doit être allégé (on enlève les bancs et tout ce qui n’est pas essentiel). Le problème, c’est que l’hélico vient chercher le corps d’un grimpeur tombé quelques jours plus tôt. Le moment est lourd. On voit le sac être accroché au cable, puis l’hélico nous survoler. C’est paradoxal. Je suis là pour célébrer la vie et non tromper la mort. C’est un moment de silence pour tous les grimpeurs témoins.
Puis je me reconcentre. Je vais rester concentré jusqu’au retour au camp de base. Pas question que je sois dans un sac comme ça.
Après notre première nuit, on se réveille avec une bonne météo. Je suis surpris. Il faut que la météo tienne quelques jours encore par contre pour qu’on ait une chance.
On entend, puis on voit ensuite un hélicoptère. C’est tellement haut que l’hélico doit aller plus bas, doit être purgé de la majorité du carburant, doit être allégé (on enlève les bancs et tout ce qui n’est pas essentiel). Le problème, c’est que l’hélico vient chercher le corps d’un grimpeur tombé quelques jours plus tôt. Le moment est lourd. On voit le sac être accroché au cable, puis l’hélico nous survoler. C’est paradoxal. Je suis là pour célébrer la vie et non tromper la mort. C’est un moment de silence pour tous les grimpeurs témoins.
Puis je me reconcentre. Je vais rester concentré jusqu’au retour au camp de base. Pas question que je sois dans un sac comme ça.
Après 4 nuits et une tente d’expédition détruite par le vent, on a une fenêtre possible. Les prévisions ne sont pas bonnes, mais ça semble stable. On décide d’y aller. C’est notre moment. Time to shine.
On commence par l’autobahn, la partie où il y a le plus d’accidents. Une traverse de 1,5 km où chaque pas doit être calculé. Pas de place pour l’erreur. La chute ne pardonne pas et le chemin est parfois tellement étroit qu’on a à peine la largeur d’une botte pour se poser. On appelle cette partie l’autobahn parce qu’un grimpeur allemand est tombé il y a quelques années et a emporté sa cordée vers le bas de la traverse.
On commence par l’autobahn, la partie où il y a le plus d’accidents. Une traverse de 1,5 km où chaque pas doit être calculé. Pas de place pour l’erreur. La chute ne pardonne pas et le chemin est parfois tellement étroit qu’on a à peine la largeur d’une botte pour se poser. On appelle cette partie l’autobahn parce qu’un grimpeur allemand est tombé il y a quelques années et a emporté sa cordée vers le bas de la traverse.
On se rend jusqu’au Denali pass où on encaisse des vents de 30 à 40 km/h. C’est froid et le visage est un peu engourdi, mais tout répond bien. On pousse.
On monte la grande pente vers le sommet. Et les heures passent. La journée sera longue.
En arrivant au Archdeacons Tower, il nous reste environ 2 heures marche. Pas beaucoup plus. On arrête pour une pause rapide pendant laquelle je réalise que mon balaclava est gelé comme un morceau de glace.
Puis tout bascule. Le guide me dit de me détacher de la corde. Quand je m’approche, il me dit de me rattacher et qu’on retourne. Je ne comprends rien de ce qui se passe. Je suis évidemment fatigué, mais je me sens 100% capable de continuer. Je suis prêt pour plus. Mais il me dit que c’est le temps de retourner. Qu’est-ce qui se passe ?
Un des membres de notre expé ne peut plus continuer. C’est trop pour lui.
Puis, pendant une seconde, j’ai un espoir. Une cordée de la même compagnie que la mienne vient à notre hauteur. Ils vont vers le sommet aussi. Quel bonheur, j’atteindrai le sommet.
Alors que je m’avance vers le groupe, je vie un autre choc. Le client de l’autre cordée refuse qu’on joigne son groupe. Il dit haut et fort qu’il a payé pour un groupe privé alors il refuse tout grimpeur supplémentaire. Il me vole le sommet. Je le ne crois pas.
C’est sans appel. Nous devons redescendre.
Je regarde le sommet et le groupe qui s’y rend. Puis je me retourne et me concentre sur la descente. Le sentiment est plus qu’amer. J’accepte que la montagne ne me laisse pas passer, mais que ce soit un humain (et non moi-même) qui m’oblige à rebrousser chemin est indigeste.
On monte la grande pente vers le sommet. Et les heures passent. La journée sera longue.
En arrivant au Archdeacons Tower, il nous reste environ 2 heures marche. Pas beaucoup plus. On arrête pour une pause rapide pendant laquelle je réalise que mon balaclava est gelé comme un morceau de glace.
Puis tout bascule. Le guide me dit de me détacher de la corde. Quand je m’approche, il me dit de me rattacher et qu’on retourne. Je ne comprends rien de ce qui se passe. Je suis évidemment fatigué, mais je me sens 100% capable de continuer. Je suis prêt pour plus. Mais il me dit que c’est le temps de retourner. Qu’est-ce qui se passe ?
Un des membres de notre expé ne peut plus continuer. C’est trop pour lui.
Puis, pendant une seconde, j’ai un espoir. Une cordée de la même compagnie que la mienne vient à notre hauteur. Ils vont vers le sommet aussi. Quel bonheur, j’atteindrai le sommet.
Alors que je m’avance vers le groupe, je vie un autre choc. Le client de l’autre cordée refuse qu’on joigne son groupe. Il dit haut et fort qu’il a payé pour un groupe privé alors il refuse tout grimpeur supplémentaire. Il me vole le sommet. Je le ne crois pas.
C’est sans appel. Nous devons redescendre.
Je regarde le sommet et le groupe qui s’y rend. Puis je me retourne et me concentre sur la descente. Le sentiment est plus qu’amer. J’accepte que la montagne ne me laisse pas passer, mais que ce soit un humain (et non moi-même) qui m’oblige à rebrousser chemin est indigeste.
Nous retournons au camp en restant concentrés. La majorité des accidents en montagne arrivent lors du chemin du retour. Puis nous avons décidé de quitter la montagne sans trop attendre. Dès le lendemain, nous avons défait le camp et avons marché jusqu’au camp 14'000. On y mange, on se repose un peu, on prend les vivres laissés là et on continue.
On traverse le camp 11'000. On prend encore plus de matériel laissé et on continue. On atteint le camp 8'000 à 1 heure le matin. Près de 10'000 pieds verticaux en une journée avec des charges lourdes. On lance nos matelas de sols par terre et on dort 5 heures à la belle étoile sur le glacier. Puis on se relève et on continue.
On atteint le camp de base le matin et en moins d’une heure, on est dans un avion qui quitte le glacier. Tout a déboulé tellement vite. C’est irréel encore. Qu’est-ce qui vient de se passer ?
On atteint le camp de base le matin et en moins d’une heure, on est dans un avion qui quitte le glacier. Tout a déboulé tellement vite. C’est irréel encore. Qu’est-ce qui vient de se passer ?
Avec un peu de recul, je réalise que c’est un certes un non-sommet, mais ce n’est pas un échec. Une expédition, c’est un grand travail d’équipe. Notre entraide a été essentielle pour se rendre si près du but. L’échec aurait été de ne pas essayer. L’échec aurait aussi été pour notre ami de pousser au delà de ses limites et de menacer potentiellement notre sécurité. Alors non, ce n’est pas un échec. Nous sommes rentrés en toute sécurité.
En retournant en ville, je vois le tableau de l’année. Les stats parlent d’elles même. De plus, les 4 jours suivants ont été tellement mauvais côté météo qu’aucun avion n’a même pu atterrir au camp de base. Des groupes importants ont dû quitter sans atteindre le sommet. On m’a dit que le % de sommet pour ce mois de mai aura finalement été d’un peu moins de 15%. Un des pires de l’histoire. Mais bon, c’est la montagne qui décide.
Le sommet est facultatif, mais de revenir en santé est obligatoire. C’est ce que nous avons réussi. Et la montagne est toujours là. Alors je la reverrai.
En retournant en ville, je vois le tableau de l’année. Les stats parlent d’elles même. De plus, les 4 jours suivants ont été tellement mauvais côté météo qu’aucun avion n’a même pu atterrir au camp de base. Des groupes importants ont dû quitter sans atteindre le sommet. On m’a dit que le % de sommet pour ce mois de mai aura finalement été d’un peu moins de 15%. Un des pires de l’histoire. Mais bon, c’est la montagne qui décide.
Le sommet est facultatif, mais de revenir en santé est obligatoire. C’est ce que nous avons réussi. Et la montagne est toujours là. Alors je la reverrai.